Décidément, cette année, Les Nuits de Fourvière frappent très fort en offrant, coup sur coup, The Black Keys, suivi, le lendemain, des Queens Of The Stone Age (puis, durant l’été, Sigur Rós, Ben Harper ou Antibalas… ). Dès l’annonce du passage des Californiens à Fourvière, on savait que le concert allait être spécial, d’une part pour le choix du lieu, exceptionnel (on ne le dira jamais assez) mais surtout, pour sa jauge relativement réduite (4000 personnes, ce qui est peu, comparé à un Zénith ou un Bercy, d’ou se produit habituellement la bande). Enfin, gage de qualité, Arte ET France Inter (via Very Good Trip) ont fait le déplacement afin de retransmettre le concert à la tv et à la radio en direct.
Bref, une petite nuit de repos après avoir été à la rencontre de Patrick Carney, Dan Auerbach et leurs amis, nous revoilà donc de retour à Lyon, au sein du sublime théâtre gallo-romain, face à Josh Homme et ses Reines de l’Âge de Pierre, venus défendre leur nouvel album au titre parfaitement adapté à cette soirée : In Times New Roman.
21h20, Coach Party investi la scène du théâtre pour un semblant de première partie. Un « semblant », car la tâche s’annonce particulièrement ardue: Imaginez 4000 fans des QOTSA chauffés à blanc, boissons houblonnées à la main, prêts à en découdre. Oui, il va falloir assurer afin de marquer les esprits. Originaire de l’île de Wight, comme le dernier phénomène rock qu’est Wet Leg, Coach Party évolue dans un genre similaire mais plus orienté 90’s. Le groupe, qui s’est récemment fait connaître en France en ouverture d’Indochine, n’est pas particulièrement original mais se donne néanmoins à 100% en enchaînant des titres catchy honnêtes, sans pour autant être particulièrement marquants. On tâchera tout de même de ne pas les perdre de vue afin de voir comme ils évoluent.
Les Reines débarquent sur scène une heure plus tard, et n’ont pas l’air d’être là pour déconner. Qu’il s’agisse de Van Leeuwen, Fertita, Theodore ou de Shuman, tous affichent un sérieux à toute épreuve. Seul Homme laisse transparaître une joie sincère d’être là, et il le fera d’ailleurs savoir à de nombreuses reprises durant la soirée. « No One Knows » ouvre le bal. Toujours très attendu, le groupe le lâche en ouverture, presque pour se débarrasser de ce fardeau, de ce grand classique néanmoins indispensable à chacun de ses concerts. Il est magistralement interprété et met tout le monde d’accord, offrant une explosion de joie d’une grande partie de l’assistance. La grande classe. Un constat que l’on se fera à de nombreuses reprises ce soir. Comme on l’a souvent dit ici, les Queens ne font pas du surplace, leur discographie ou aucun disque ne se ressemble, en est l’exemple parfait. Sur scène, c’est la même. Le quintet préfère se concentrer sur ses derniers albums (…Like Clockwork, Villains et In Times New Roman donc) plutôt que surfer sur une certaine forme de nostalgie en jouant sans cesse ses vieux succès. Aussi, on aura droit ce soir à aucun titre de Queens Of The Stone Age (pourtant réédité l’an passé), un seul extrait de Rated R, Lullabies to Paralyse et Era Vulgaris. Pas vraiment le genre de setlist « best of » que nous réserve beaucoup de formations actuelles. Plutôt bavard, l’immense (par la taille comme par le talent) Joshua Homme, d’excellente humeur, a pas mal de chose à partager. Sans tomber dans le blabla traditionnel pour meubler entre deux titres, ses propos sont un brin lunaire mais restent amusants. Si le groupe connaît avec précision les chansons qui vont retourner l’assistance (outre « No One Knows », on peut citer le dansant « Smooth Sailing », « Make It With Chu » et ses guitares sous forme d’hommage au « Miss You » des Stones, « I Sat By The Ocean » et « Little Sister »), il n’en oublie pas pour autant de jouer des choses moins évidentes, comme l’excellent « Straight Jacket Fitting » (qui clôt leur nouvel album), sur lequel Homme prend le temps de poser sa guitare afin de de faire participer son public. Excepté son leader, qui reste le seul membre fondateur des Reines, tous ont désormais parfaitement trouvé leur place dans le groupe: Le discret Dean Fertita (The Dead Weather), statique mais précis derrière ses claviers, le sorcier Troy Van Leeuwen évoque un vieux rockeur de Vegas, tandis que Shuman aka Mickey Shoes, au style tout droit sorti d’un épisode des Sopranos, se jette dans tous les sens en se donnant comme un seul homme. Plus tard, on ne pourra s’empêcher de noter le vibrant hommage à feu Mark Lanegan, proche de Homme (« You French should know who Mark Lanegan is » annoncera-t-il) avec une reprise de « In The Fade », franchement poignant, originellement chanté par l’ancien leader des Screaming Trees, et tiré de Rated R. Le groupe enchaîne sur un « God Is On The Radio » (avec à l’origine, également Lanegan au chant) absolument renversant. A défaut de quitter la scène et d’attendre d’interminables encouragements du public afin de les faire revenir, (« I just don’t wanna leave so we’re just gonna stay […] I don’t give a shit about this encore bullshit » confiera Homme), les Queens Of The Stone Age concluent un set généreux par un « Go With The Flow », grand favori des fans puis « A Song For The Dead », qui, non content de rendre le public complètement fifou, offre tout l’étendu du talent de Jon Theodore, qui n’a définitivement rien à envier à Dave Grohl (présent, rappelons-le, sur une bonne partie de l’album Songs for The Deaf et de la tournée qui s’ensuivit). Si la veille, on s’était dit que les Black Keys avait sacrément assuré devant une scène sold out, ce soir, on se fait la remarque que les QOTSA n’appartiennent définitivement pas à la même catégorie de groupe, car ils nous ont offert un concert de haute volée, un grand, TRÈS GRAND moment de rock ‘n’ roll sans concession que l’on ne risque pas de revivre de sitôt. Croisé à la fin du concert, Michka Assayas (à la tête de Very Good Trip) qui les a justement mis à l’honneur lors d’une émission spéciale à réécouter ici, NDLR), partagera largement notre engouement pour la prestation des Queens.
Setlist
If I Had a Tail
Queens Of The Stone Age & Coach Party
Festival: Les Nuits de Fourvière
Photos de Quentin Lafont © et Andreas Neumann ©
Relisez notre critique des albums Queens Of The Stone Age,
Songs For The Deaf, Villains et In Times New Roman
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