Le très bon accueil réservé au premier album des Français d’Untitled with Drums est amplement mérité, à l’image de la chronique dithyrambique du toujours très pertinent Bertrand Pinsac dans le dernier numéro du magazine de référence New Noise. En effet, les cinq protagonistes du combo clermontois, emmené par le talent et l’inspiration de Martin LB, rivalisent aisément avec la fine fleur des musiques extrêmes et bruyantes mondiales.
Hollow se présente comme une œuvre compacte, extrêmement dense, à lacohérence sonore et esthétique bluffante. L’ensemble ne se signale pourtant par aucune réelle fulgurance, et distille même un sentiment de plénitude troublant pour une œuvre aussi mélancolique et rageuse (sentiment particulièrement bien retranscrit par la pochette sobre et parlante), à la manière de Jesu, le groupe de post-metal shoegaze de Justin Broadrick. Pourtant Untitled with Drums déploie une masse sonore considérable qui donne un effet de puissance évident et implacable. Chacune des compositions se signale par une véritable maîtrise instrumentale, commune et complice, que vient sublimer l’oreille avisée et experte du très réputé Serge Morattel. Le propos est d’une justesse imparable, foncièrement économe dans l’instant mais peu avare de développement sur la longueur. Ce nouveau disque synthétise avec brio, la culture musicale rock, au sens large du terme, de chacun des cinq protagonistes, même si celle-ci doit avoir comme points communs des attirances pour le metal, la noise, le post-rock et le post-hardcore. Les catalogues des labels Temporary Residence Ltd. (Mogwai, Young Windows, Mono…), Relapse (Torche, Nothing, Yob, Red Fang…), Ipecac (Dead Cross, Isis, Dub Trio…) comme des figures telles que Deftones, Failure, Unsane, Quicksand ou Helmet doivent alimenter les discussions et les débats. Ainsi, sans dévier de sa trajectoire, Untitled with Drums est capable de convoquer le lyrisme du grunge, la tension et l’explosivité de la noise, les digressions du post-rock, les élans oniriques du post-metal. Enfin, UWD se distingue évidemment par la personnalité vocale de Martin, qui sans pouvoir en appeler à l’étendu du registre d’un Chris Cornell (Soundgarden), s’inscrit dans l’esprit des voix marquantes et typiquement associés aux années 90, comme Chino Moreno des Deftones (« Stasis ») ou Ken Andrews de Failure (« Amazed »), Walter Schreifels de Dead Heavens, Gorilla Biscuits, Quicksand (« Strangers), notamment dans ce jeu de contraste entre un chant murmuré et des élans rageurs variables : les deux premiers revendiquant d’ailleurs l’influence considérable de Dave Gahan de Depeche Mode. Il serait intéressant de demander au leader d’UWD, justement si lui aussi directement imprégné par le magnétisme de ce frontman iconique. Par moment, les intonations du chant évoquent celle d’un Gavin Rossdale (« Play with Fire », « Consider »), second couteau du grunge au sein de Bush, mais certainement l’une des voix les plus marquantes et émotionnelles de la déferlante déclenchée par Nirvana. Cet album aligne aussi de très bonnes chansons, et en cela, Martin se rapproche par moment, des dernières évolutions de Page Hamilton, le leader d’Helmet (« Passing On »), dans cette façon de construire des lignes de chants presque pop et évolutives, dans un contexte bruitiste et soutenu.
En résumé, comme leurs amis de Sofy Major, les membres d’Untitled with Drums répondent tout simplement par la musique, le travail et l’ambition à tous les détracteurs qui ne voient les groupes hexagonaux que comme des copies insignifiantes ou besogneuses des figures américaines ou anglaises des musiques extrêmes, avec un album totalement abouti, porteur de nombreuses perspectives pour l’avenir.
Untitled with Drums Hollow Seeing Red Records/Araki/Brigante/Atypeek Music
TRACKLIST :
Face A
Play With Fire
Passing On
Stasis
Amazed
Silver
Face B
Hex
Consider
Revolve
Heirs
Strangers
mais aussi et surtout, chez tous les bons disquaires indé’ !
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